Van Avermaet préface la saison 2018: "Ma faim de succès est intacte"
Le vainqueur du dernier WorldTour sait qu’il lui sera compliqué de faire mieux mais rêve à d’autres victoires.
- Publié le 12-12-2017 à 08h33
- Mis à jour le 12-12-2017 à 08h35
Le vainqueur du dernier WorldTour sait qu’il lui sera compliqué de faire mieux mais rêve à d’autres victoires. Ses lunettes de soleil couleur or vissées sur le nez, Greg Van Avermaet scrute d’un regard malicieux le ciel acier qui plombe, pour quelques heures, l’horizon de la Costa Blanca. "Quelqu’un a-t-il ramené cette météo dans ses valises ?" , sourit le champion olympique. Installé depuis quelques jours dans le superbe domaine La Sella, à Denia, pour le premier des trois rassemblements collectifs hivernaux de l’équipe BMC, le numéro un mondial et vainqueur du dernier classement WorldTour a préfacé sa prochaine campagne au sortir d’un entraînement léger de deux heures.
Greg, avez-vous déjà défini les premiers contours de votre saison 2018 ?
"Oui. Mon programme de course ne changera d’ailleurs pratiquement pas. Comme la saison dernière, je reprendrai le collier sur le Tour de Valence, une épreuve qui s’est révélé être une excellente alternative au Tour du Qatar. J’enchaînerai ensuite avec le Tour d’Oman, le week-end d’ouverture belge, les Strade Bianche, Tirreno puis Milan-Sanremo et la campagne des classiques flandriennes. En 2017, cela m’avait plutôt bien réussi… (rires)."
Comme la saison dernière, aussi, vous avez observé une coupure hivernale de six semaines. Mais dans des conditions très différentes cette fois…
"Effectivement. L’hiver dernier, cela m’avait été dicté par ma blessure à la cheville. Je me limitais autrefois à une trêve d’un mois mais j’ai mesuré à quel point la fraîcheur est un élément clé de la performance en arrivant au sommet de ma condition au meilleur des moments. Je tenterai d’appliquer la même recette à ma prochaine campagne."
Entre récompenses et sollicitations médiatiques, cette trêve aura été faite de nombreuses obligations. Avez-vous été davantage demandé que dans la foulée de votre titre olympique ?
"Oui car l’hiver dernier, beaucoup de gens se sont sans doute refusés de me solliciter en me voyant me déplacer en béquilles (rires). Les dernières semaines ont été très chargées par moments mais j’ai le réel sentiment d’avoir pu recharger pleinement mes batteries physiques et mentales. Cela fait un mois que j’ai repris la route de l’entraînement maintenant et je suis très content du niveau de condition sur lequel je peux m’appuyer aujourd’hui.
Votre premier grand rendez-vous sera donc le Circuit Het Nieuwsbad, une épreuve dont vous êtes le double vainqueur sortant. Que pensez-vous de son profond changement de parcours ?
"Ce nouveau tracé est superbe. Je trouve ça bien de remettre à l’honneur l’ancien final du Tour des Flandres avec le Mur de Grammont et le Bosberg. Ce sera une course très difficile sur laquelle il devrait logiquement être plus facile de faire une décision. Je sais qu’aucun coureur n’a jamais réussi à s’y imposer trois fois de rang mais je n’ai, étrangement, jamais eu le sentiment d’y dominer totalement mon sujet en dépit de mes deux victoires. Cela vient tôt dans la saison, c’est la première fois qu’on puisse aussi loin dans ses ressources…"
Un compétiteur rêve normalement toujours plus grand. Mais est-il possible de faire mieux que votre fantastique moisson de 2017 ?
"Ce sera déjà très difficile de faire aussi bien (rires) . Mais je peux sans doute aussi briller d’une autre manière, sur un terrain qui m’a moins réussi lors de la campagne écoulée. Mon printemps a été étincelant mais le Tour de France et la seconde partie de saison m’ont laissé un petit goût de trop peu. À défaut de faire mieux, 2018 pourrait être différent. Ma faim est en tout cas intacte. Mon palmarès s’est épaissi, mais ce n’est pas comme si j’avais déjà gagné quatre fois le Tour des Flandres ou Paris-Roubaix (rires) …"
Parmi les courses qui manquent encore à votre palmarès, laquelle jugez-vous la plus facile et la plus difficile à remporter ?
"La plus difficile, c’est sans doute le Mondial car vous y êtes dépendant du parcours mais aussi d’une équipe qui ne cohabite qu’une fois par an. Cette année, je trouve cela très bien que les grimpeurs se voient offrir une occasion d’enlever le maillot arc-en-ciel, mais plus égoïstement, cela veut dire que c’est une opportunité en moins pour moi. Il ne faut jamais dire jamais, mon succès à Rio l’a prouvé, mais il me sera compliqué de jouer la gagne en Autriche. Pour ce qui est de l’épreuve que je pense la plus facile à épingler, je citerais le Ronde ."
Et pourquoi ?
"Tout simplement parce que je reste convaincu que c’est celle qui colle le mieux à mes qualités naturelles mais aussi car si vous y êtes en grande forme vous avez pratiquement l’assurance d’y disputer la finale."
Mentalement, vous avez souvent répété que votre succès sur le Tour de France à Rodez ainsi que le titre olympique avaient constitué des déclics importants. Votre précédente campagne a-t-elle un peu plus consolidé votre confiance en vous ?
"D’une certaine manière, oui, car j’ai remporté le monument après lequel je courrais depuis si longtemps et que j’ai accompli une jolie série sur mon terrain de prédilection : les classiques pavées."
Le noyau de l’équipe a subi plusieurs changements. Pensez-vous être aussi bien armé pour la campagne du Nord ?
"Oui, je crois. Nous avons perdu Oss (parti chez Bora-Hansgrohe) , mais Roelandts nous a rejoints. Il possède une énorme expérience et dispose d’une parfaite connaissance du terrain des classiques. Je crois aussi que l’Italien Bettoil (arrivé de chez Cannondale) est une excellente recrue."
"J’aime beaucoup courir contre Phil"
Autrefois équipier de Gilbert, le Waeslandien apprécie la rivalité sportive qui les oppose désormais.
Soleils d’un dernier printemps belge rayonnant, Greg Van Avermaet et Philippe Gilbert y ont incarné nos deux plus redoutables chasseurs de classiques. Autrefois refrénées par une cohabitation quelque peu contre-nature chez BMC, les anciens équipiers peuvent laisser libre court à leurs ambitions personnelles depuis que le Liégeois a troqué le maillot rouge et noir pour celui de la formation Quick Step l’hiver dernier.
"J’aime beaucoup courir contre Phil, sourit ainsi le Waeslandien. Cela reste difficile à expliquer, mais le jeu d’équipe peut parfois vous donner le sentiment de vous retrouver bloqué par certains scénarii. Même si nous ne partagions pas souvent le même programme de course lorsque nous évoluions sous la même tunique, les choses sont aujourd’hui bien plus simples pour Philippe et moi : il nous suffit de rouler aussi fort que possible dans la finale."
Une rivalité qui, aux yeux du dernier vainqueur de Paris-Roubaix, l’amène à se dépasser.
"Ce sont vos opposants qui vous poussent à tirer le meilleur de vous même car vous savez qu’il vous faudra être meilleur qu’eux en course pour espérer lever les bras", continue Van Avermaet. "Nous visons désormais les mêmes épreuves mais nous nourrissons, je pense, le même respect l’un pour l’autre. Lorsque Phil me devance, je ne manque jamais de le féliciter en soulignant qu’il était le plus fort et lui en fait de même lorsque je viens à le battre. C’est la nature même du sport. Je suis ainsi réellement heureux pour lui qu’il a pu vivre une saison 2017 aussi faste avec ses succès sur le Tour des Flandres et l’Amstel Gold Race. Je le crois sincèrement revenu à son meilleur niveau."
De quoi laisser présager d’autres somptueux duels sur le prochain Ronde ou Paris-Roubaix…
Il ne sera pas au départ de Liège-Bastogne-Liège
Onzième du dernier Liège-Bastogne-Liège, Greg Van Avermaet n’étendra pas son printemps des classiques jusqu’à la Doyenne la saison prochaine. "La décision a été prise en concertation avec le staff, commente ainsi le champion olympique. Cette épreuve vient au terme d’une période terriblement harassante tant sur le plan physique que mental pour un coureur de pavés comme moi. Et il est extrêmement énergivore d’ajouter une épreuve que j’aime pourtant beaucoup à mon calendrier. Je n’ai aucun regret de l’avoir fait l’année dernière puisque j’appartenais au groupe de tête qui s’est joué la victoire à Ans, mais je crois qu’il ne serait pas très sage de répéter l’expérience. Si je voulais vraiment viser ce monument, il me faudrait alors remanier totalement mon programme de course."
Il teste les freins à disque
Adepte, jusqu’ici, d’un système de freinage classique sur sa monture, Greg Van Avermaet teste lors de ce premier camp d’entraînement les controversés freins à disque. Tom Boonen, l’un des défenseurs de ce procédé, les avaient utilisés au début de la saison 2017 avant de revenir au système à patins pour les échéances les plus importantes de sa saison.
Une touche de bleu sur le maillot 2018
Si le design du maillot de la formation BMC pour la saison 2018 n’a pas subi de profonde révolution, une note de bleu s’est toutefois invitée sur le col (ainsi qu’à l’arrière du cuissard). Une entorse au mariage du rouge et du noir visant à mettre en exergue l’arrivée d’un nouveau partenaire : Sophos, une société spécialisée dans la cybersécurité.
Trois objectifs majeurs
Au moment de préfacer les ambitions de BMC pour la saison 2018, le manager Jim Ochowicz s’est voulu on ne peut plus clair. "Nous voulons enlever un nouveau monument, monter sur le podium final du Tour de France avec Porte et redevenir champions du monde du contre-la-montre par équipes."
Son avis sur....
Le Tour de France: "Je peux repenser au maillot jaune"
Même s’il avoue ne pas encore avoir étudié le parcours de la prochaine Grande Boucle dans tous ses détails, Greg Van Avermaet a d’ores et déjà fait du Tour un incontournable de sa saison. "La priorité de l’équipe sera de tenter d’y décrocher un podium final avec Porte, mais je pense avoir ma place dans la sélection. J’aurai, au moins, une opportunité d’espérer enlever une étape. Je peux même repenser au maillot jaune que j’avais endossé en 2016 puisque la première semaine de course sera très nerveuse et que le contre-la-montre par équipes prévu le troisième jour constitue l’une des spécialités de notre formation."
Le dopage mécanique: "Je ne crois pas à l’histoire du moteur dans le vélo de Cancellara"
Revenu sur le devant de la scène cet hiver après les déclarations de l’ancien coureur Phil Gaimon, le sujet du dopage mécanique laisse Greg Van Avermaet plutôt circonspect. "Je ne crois pas à l’histoire du moteur dans le vélo de Cancellara, avoue ainsi le Flandrien. Le Suisse avait déjà remporté de grandes courses avant l’année 2010 sur laquelle il est incriminé et je ne peux concevoir qu’il a pris le risque de tenter une telle tricherie. Elles impliquent de nombreuses complicités. Aujourd’hui non plus, je ne pense pas qu’une formation soit prête à cela…"
Son statut de leader: "Je veille à entretenir l’ambiance"
Figure phare de la BMC, Greg Van Avermaet incarne aussi le grand frère des jeunes talents belges que sont Van Hooydonck (22 ans), Teuns (25) et Vliegen (23). "Je considère qu’il m’appartient d’entretenir l’ambiance et l’esprit d’équipe dans la formation, avoue le médaillé d’or de Rio. L’atmosphère est essentielle à la performance. Si vous voulez inciter vos équipiers à aller au feu pour vous, il faut que le courant passe bien avec ceux-ci. Je tente aussi de faire profiter nos talents de mon expérience en communiquant avec eux mais aussi en les responsabilisant face aux opportunités qu’ils ont à saisir."